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15.10.2021

Asie du Sud-Est : un grand centre de fabrication connaît des revers majeurs sur sa chaîne d'approvisionnement

Certains pays du Sud-Est asiatique, également regroupés au sein de l'Association des nations de l'Asie du Sud-Est (ANASE), luttent contre une nouvelle vague de COVID-19, tout en étant simultanément confrontés à des événements catastrophiques qui ravagent leurs économies. Les conditions météorologiques extrêmes, qui comptent plusieurs inondations graves recensées en plus de la saison des typhons dans le Pacifique, font partie des calamités auxquelles est confrontée l'ANASE, sans compter le prolongement incessant des délais de fabrication.

La Malaisie, le Vietnam, la Thaïlande, les Philippines et Singapour figurent parmi les pays membres de l'ANASE qui contribuent à la fabrication d'une grande quantité de composants électroniques.

La Malaisie compte à elle seule plusieurs usines de fabricants importants tels qu'AMD, NXP, Nexperia, ON Semiconductor Renesas ou encore STMicro. En juillet, les autorités malaisiennes ont déclaré que l'industrie électrique et électronique faisait partie des services essentiels pendant le confinement national lié à la COVID-19, dans la mesure où il permet à 60 % de la main-d'œuvre de se rendre sur place dans les usines. Certains fabricants, dont ON Semi et AMD, ont dû mettre totalement à l'arrêt leurs sites de production suite à la détection de cas de COVID-19 dans leurs locaux. La production de l'automobile et de micro-processeurs industriels sont quelques-uns des secteurs concernés par ces délais, lesquels exigent une réallocation stratégique de la main-d'œuvre en vue de répondre à la demande. Le confinement a été récemment prorogé pendant six semaines, ou jusqu'à ce que le pays soit parvenu à vacciner 10 % de sa population.

L'industrie des semi-conducteurs est relativement émergente au Vietnam, où la part de marché était estimée à 6 milliards de dollars entre 2020 et 2024 ; toutefois, la pandémie pourrait contrecarrer cette phase de progression en raison des fermetures d'usines et des retards qui commencent à s'accumuler dans un contexte où la demande de processeurs ne cesse de progresser. La récente épidémie de COVID-19 au Vietnam a entraîné la mise à l'arrêt de plusieurs usines implantées dans le Parc technologique de Saïgon. Les firmes Intel et Samsung y exploitent des fabriques dont elles ont dû restreindre l'activité. Intel a notamment différé la production de ses processeurs de prochaine génération en raison d'obstacles liés à la fabrication, tandis que Samsung a pour sa part revu à la hausse les prix de ses composants et rallongé ses délais de livraison. La fermeture de l'usine de Hô-Chi-Minh-Ville pour cause de COVID-19 entraîne également un prolongement considérable des délais pour ON Semi, qui voit ses dates de livraison initiales reportées jusqu'en 2022. ON Semi a adressé au troisième trimestre une lettre à ses clients pour les informer des retards affectant ses sites de fabrication au Vietnam et en Thaïlande.

NXP, Macronix, Intel et Samsung exploitent également des usines en Thaïlande et sont tenus de se conformer aux injonctions gouvernementales dans le cadre de l'épidémie de COVID-19. La persistance des contaminations dans les locaux s'est traduite par une réduction de capacité de la main-d'œuvre et, dans certains cas, par des mises à l'arrêt complètes, qui compliquent encore davantage les opérations de fabrication. Les exportations nationales thaïlandaises reposent en grande partie sur l'industrie électrique et électronique (E&E), y compris la fabrication de semi-conducteurs. Les exportateurs d'Asie du Sud-Est estiment qu'en cas de persistance des ruptures entre août et décembre, les exportations verront leur solde chuter de 9 milliards de dollars. L'industrie E&E représentait encore 24 % des exportations de la Thaïlande en 2019.

La fabrication de semi-conducteurs compte pour environ 73 % de l'industrie électronique aux Philippines. Cette branche, combinée au secteur de l'électronique, est valorisée à 17,99 milliards de dollars. Cette branche représente une part considérable de la croissance économique du pays grâce aux exportations, à la fabrication, à l'assemblage et au conditionnement de composants électroniques. À titre d'illustration, 19 % des exportations des Philippines sont destinées à Hong Kong, tandis que 13 % visent le marché américain. La Chine, Singapour et le Japon figurent également parmi les cinq premiers débouchés à l'export. La position géographique des Philippines sur la « ceinture de feu du Pacifique » rend cet archipel sensible aux tremblements de terre et, plus récemment, aux évacuations successives causées par les menaces d'émissions et d'éruptions volcaniques du mont Taal.La mousson qui inonde certaines régions des Philippines, conjuguée à la pandémie et à la vulnérabilité résultant de l'activité sismique dans cette région, sont autant de facteurs d'influence sur la fabrication et le commerce nationaux philippins. Au mois d'avril, le site portuaire de Manille a enregistré un déficit commercial de 2,73 milliards de dollars, soit le dixième mois consécutif au cours duquel cet écart franchit la barre des 2 milliards. En outre, la récente flambée de COVID-19 entraîne des restrictions gouvernementales qui ont un impact sur l'activité des usines de Murata et de Samsung, principalement orientées vers la production de MLCC. Les fermetures imminentes d'usines et la réduction de la capacité de la main-d'œuvre s'ajoutent à la probabilité accrue de pénurie imminente de MLCC, dans un contexte marqué par une forte demande sur les smartphones et véhicules électriques et une progression des produits 5G.

Considérant cette thématique commune de croissance économique apportée par l'industrie des semi-conducteurs dans les pays de l'ANASE, Singapour a élaboré un plan décennal centré autour de ses parts de marché dans le secteur de la fabrication. Ce plan vise à renforcer le secteur manufacturier, qui contribue aux 21,7 % de croissance de la production électronique déjà comptabilisés cette année. En 2018, Singapour détenait 11 % du marché mondial de la production de puces, avec Micron, Texas Instruments, GlobalFoundries et Infineon figurant parmi les premières entreprises ayant investi dans des usines de micro-processeurs sur ce territoire. La position commerciale de Singapour attire les fabricants par sa domination du secteur des installations portuaires et de raffinage, évalué à 30 milliards de dollars. Si les catastrophes naturelles constituent actuellement la principale menace sur la chaîne d'approvisionnement des autres pays de l'ANASE, les plus importants défis auxquels Singapour fait face sont les restrictions gouvernementales liées à la COVID-19, ainsi que la concurrence des autres démographies qui se disputent la souveraineté dans le domaine des semi-conducteurs.

 

Les chaînes d'approvisionnement vont-elles retrouver bientôt une situation normale ?

Les entreprises dépendantes de l'approvisionnement en composants électroniques poursuivent leur lutte pour répondre à la demande de pièces nécessaires aux appareils grand public, véhicules, équipements des réseaux 5G et autres applications.D'après certains analystes, il est d'ores et déjà à prévoir que les pénuries de processeurs persisteront jusqu'en 2023, compte tenu des problèmes de prix, de délais et de retards de production qui ont émaillé les trimestres précédents. Dès lors, la question suivante se pose : quels sont les principaux freins à la reprise du marché ?

Globalement parlant, la chaîne d'approvisionnement mondiale se caractérise par sa volatilité. Un important contributeur de cette tension, qui affecte la fabrication de composants électroniques, est le manque de diversification dans la localisation des sites de production de semi-conducteurs au niveau mondial. L'Asie détient environ 75 % du marché de fabrication des semi-conducteurs, ce qui incite l'UE et les États-Unis à mettre au point une stratégie visant à accélérer les plans de relocalisation de leur production dans différentes régions au cours des prochaines années. Pour autant, construire des usines, les doter d'un personnel complet et les mettre en service ne se fait pas du jour au lendemain. Les fabricants doivent donc se contenter des usines de fabrication actuellement en activité (principalement situées en Asie) pour faire face à l'imprévisibilité de la chaîne d'approvisionnement mondiale.

Disruptions à l'échelle planétaire

L'ANASE n'est pas le seul groupe démographique à être touché par le COVID-19 et les incidents climatiques extrêmes, lesquels auront probablement une incidence sur les pénuries de semi-conducteurs.

La Chine orientale subit d'importantes inondations et les effets de typhons ayant entraîné la fermeture de plusieurs aéroports et ports de commerce. Le port de Yangshan, qui s'étend au large de la partie méridionale de Shanghai et compte parmi les plus vastes regroupements de terminaux à conteneurs au monde, a dû évacuer plusieurs centaines de navires en prévision de l'impact du typhon In-Fa qui a sévi dans la région. Les cessations d'activité survenues dans les principaux ports auront des conséquences majeures sur l'ensemble des mouvements de navires et des livraisons d'entrepôts jusqu'à ce que les opérations puissent reprendre, ce à quoi s'ajouteront des hausses probables des prix du transport maritime et du cours des matières premières. La fermeture du port de Yantian au deuxième trimestre par suite de l'épidémie de COVID-19 a d'ores et déjà eu des répercussions en termes de prix et de retards d'expéditions. Ces obstacles supplémentaires ne manqueront pas de venir s'ajouter aux augmentations déjà évoquées.

Dans la partie septentrionale de l'Asie, l'île de Taïwan héberge à elle seule 53 % du marché mondial des semi-conducteurs, les principaux fabricants TSMC, UMC et Samsung y ayant installé leurs usines. Le pays connaît sa pire sécheresse depuis un demi-siècle, laquelle a causé la mise à l'arrêt de certaines usines et ce, malgré les efforts de réaffectation mis en place. Néanmoins, malgré la sécheresse et l'épidémie de COVID-19, Taïwan continue d'engranger des recettes économiques grâce à la demande de semi-conducteurs et de composants électroniques, qui a atteint un record historique en mai et juin. Bien que cette forte demande revête des aspects positifs, certains fabricants comme Macronix parviennent difficilement à suivre le rythme. Macronix a temporairement fermé l'une de ses usines taïwanaises pour cause de COVID-19, ce qui a retardé toutes les livraisons prévues aux mois de juin et juillet. Les délais de livraison sont passés de 18 à 24 semaines et les prix des circuits intégrés Macronix devraient subir une hausse de 18 à 40 % au troisième trimestre.

L'Europe occidentale subit une dévastation similaire, à laquelle s'ajoutent des pluies torrentielles et des inondations qui perturbent les chaînes d'approvisionnement. Les importantes inondations qui ont touché l'Allemagne, la Belgique, la Suisse, le Luxembourg et les Pays-Bas ont également eu des répercussions sur le négoce de diverses marchandises, les pays tentant de se remettre des dégâts considérables subis. La destruction de certaines parties du réseau ferroviaire est appelée à causer des retards dans l'acheminement des cargaisons, avec des conséquences sur le commerce dans divers secteurs, dont l'industrie automobile. Les constructeurs connaissent déjà de sévères tensions de leurs approvisionnements du fait de la pénurie mondiale de semi-conducteurs.

L'ampleur des problèmes qui affectent la chaîne d'approvisionnement mondiale laisse présager un dénouement incertain des difficultés actuellement rencontrées par les fabricants de semi-conducteurs. Alors que les entreprises et les fabricants se projettent déjà en 2022, le comportement du marché et les événements qui ont perturbé les chaînes d'approvisionnement ces derniers mois laissent présager un itinéraire parsemé d'embûches.

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